Texte à méditer :  Le monde se fera rêve, le rêve se fera monde.
   Novalis
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Mise à jour
1 mars 2011

Quatrième

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vampires

Vampires, Striges, Goules...

II - Généralités :

Le terme de vampire est le nom donné en Occident au mort qui sort de sa tombe et suce le sang des vivants.

La caractéristique première du vampire, créature non morte pour les Anglo-Saxons (undead), mort-vivant pour les francophone, est son attirance pour le sang, qu'il doit consommer en grande quantité afin de conserver son existence en suspens entre la vie et la mort. Il se nourrit donc directement sur ses victimes, les transformant parfois en vampire elles-mêmes, les laissant le plus souvent pour mortes.

Le vampire vit la nuit et dort le jour dans un cercueil, au fond d'une crypte. L'image d'un vampire ne se reflète pas dans une vitre ou dans un miroir.

Pour l'annéantir, munissez vous d'ail et d'une croix chrétienne : il ne les supporte pas ! Pour le tuer définitivement, il faut lui enfoncer un pieu en bois dans le coeur.

Ainsi, la vampire craint l'ail, la croix, l'eau bénite et le chant du coq. Un vampire surpris par la lumière de l'aube disparaît définitivement.

C'est surtout au cinéma que le vampire apparaît avec un développement anormal des dents et tout particulièrement des canines.

Si vous aimez les histoires de vampires, si vous voulez frissonner le soir dans votre lit, je vous conseille de lire le Dracula, de Bram Stoker.

Savez-vous que Dracula a vraiment existé ? Il s'appelait Vlad Tepes et vivait en Valachie. Sa cruauté était légendaire...Il empalait ses victimes.

II - DRACULA, le Prince des Vampires  :vlad Dracul Tepes III.jpg

Vlad IV (1431-1476) a porté les deux surnoms de Tepes (l'Empaleur) et de Dracula (de Dracul, le diable). Ce héros roumain a combattu les envahisseurs turcs ; c'est un tyran sanguinaire qui a fait empaler des milliers de personnes pour son seul plaisir.

En 1761, le savant naturaliste Buffon a donné le nom de vampire à des chauves-souris d'Amérique du Sud qui sucent le sang des bovins.

Le personnage de Dracula apparaît en littérature au XIX ème siècle dans l'oeuvre du romancier Bram Stoker.


Au XXème siècle, le personnage de Dracula intervient dans de nombreux films et se modifie d'un film à l'autre. Dans le Cauchemar de Dracula, de Terence Fischer, le vampire est un bel homme aux tempes grisonnantes et à l'expression tantôt distinguée, tantôt bestiale.

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Voici un extrait du Dracula de Bram Stoker, qu'on pourrait intituler "descente aux enfers..."

Journal de Jonathan Harker, le narrateur enfermé dans le château du Comte Dracula...

Dans un coin de la pièce, je vis une lourde porte. Je tentai de l'ouvrir : puisque je ne découvrais pas la clé de la chambre ni celle de la porte d'entrée, principal objet de mes recherches, je devais poursuivre mes fouilles, sans quoi mes efforts auraient été vains. Elle était ouverte et menait, par un couloir en pierre, à un escalier en colimaçon qui descendait fort rapidement. Je descendis, non sans prudence car les marches raides n'étaient éclairées que par des rares meurtrières dans l'épaisse maçonnerie. A la dernière marche, je me retrouvai devant un passage, semblable à un tunnel à travers lequel parvenait une terrible odeur de mort - l'odeur d'une terre quon vient de retourner après des années. je m'enfonçai dans le passage et l'odeur se fit plus lourde, plus proche. Finalement, je poussai une autre porte, massive, et me retrouvai dans une vieille chapelle en ruine qui, de toute évidence, avait servi de cimetière. Le toit était détruit et, à deux endroits, des marches conduisaient à des caveaux. Le sol avait été retourné de fraîche date et l'on avait placé de la terre dans de grandes caisses en bois - celles mêmes que les Slovaques avaient apportées. Je ne vis personne et je tentai de trouver une sortie dérobée, mais en vain. J'examinai le sol centimètre carré après centimètre carré, pour être certain de ne pas laisser échapper la moindre chance. Puis je descendis dans les deux caveaux,, malgré l'horreur qu'en ressentait mon âme. La lumière se raréfiait encore. Je ne découvris rien, hormis des restes de vieux cercueils et de la poussière en abondance. Le troisième pourtant m'épouvanta.

Là, dans une des grandes caisses (j'en dénombrai quelque cinquante), sur une couche de terre fraîchement retournée, dormait le comte !  Je reprends le dernier mot - il n'était pas plus endormi que mort car les yeux étaient grands ouverts, comme de pierre, mais non vitreux ainsi que ceux d'un cadavre ; les joues, en dépit de leur pâleur, dégageaient de la chaleur et les lèvres étaient aussi rouges que d'habitude. Par contre, je ne découvris aucun des signes de vie que l'on cherche à trouver sur un corps - pouls inexistant, respiration nulle, aucun battement de coeur. Je me penchai sur lui, tentant de découvrir d'autres signes de vie, mais en vain. Il ne pouvait pourtant gésir ici depuis longtemps ; car l'odeur de la terre se serait éventée en quelques heures. A côté de la caisse, le couvercle, percé de petits trous. Je me dis que le comte devait concerver les clés sur lui mais quand je me penchai pour le fouiller, je rencontrai son regard, mort, dans lequel je lus pourtant une telle haine, même inconsciente, que je pris la fuite, repassai par la fenêtre et grimpai à nouveau le long du mur du château. Revenu dans ma propre chambre, je me jetai sur mon lit, épuisé, et tentai de rassembler mes idées.

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Autre récit comportant des vampires :

  • Pour débuter, si vous n'êtes pas un très bon lecteur...

Olivier COHEN, Je m'appelle Dracula, Collection "Je bouquine", Bayard Poche.

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Ambre DUBOIS, Le Manoir des Immortels, Fantastique, Nuit d'Avril. (lecture facile).

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Léon TOLSTOÏ, La Famille du Vourdalak, L'Âge d'homme, 1993.

"Il est à propos de vous dire, Mesdames, que les vourdalaks, ou vampires des peuples slaves, ne sont, dans l'opinion du pays, autre chose que des corps morts sortis de leurs tombeaux pour sucer le sang des vivants. Jusque-là leurs habitudes sont celles de tous les vampires, mais ils en ont une autre qui ne les rend que plus redoutables. Les vourdalaks, Mesdames, sucent de préférence le sang de  leurs parents les plus proches et de leurs amis les plus intimes qui, une fois morts, deviennent vampires à leur tour, de sorte qu'on prétend avoir vu en Bosnie et en Hongrie des villages entiers transformés en vourdalaks."

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Théophile GAUTIER, La Morte amoureuse

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Joseph Sheridan LE FANU, Carmilla, Thé vert, Le Familier, "Présence du fantastique", Denoël, Paris, 1990.

Le père de Laure, la narratrice, accepte de recueillir Carmilla, une jeune fille victime d'un accident de carosse près de leur demeure. Il ignore que Carmilla est une vampire.

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Claude Klotz, Dracula Père et fils, Jean-Claude Lattès, 1974.

Ferdinand Poitevin et le fils de Dracula et d'une mortelle, Herminie Poitevin. Instruit par son expérience parisienne, celui-ci est retourné dans les terres lointaines de ses ancêtres. Il explique à une assemblée de vampires comment le progrès technique va transformer leurs difficiles conditions de survie et permettre leur intégration dans l'économie mondiale. Dans cet extrait, il est à bout de force à force d'arpenter les trottoires de Paris. Il finit par entrer dans un hôpital, attiré par une affiche indiquant "semaine du sang".

- C'est beau le progrés, pense-t-il. Pendant des millénaires, nous nous sommes taillé une désastreuse réputation, et ce n'était pas notre faute. Nous devions prendre l'indispensable liqueur là où elle se trouvait, dans les veines des autres ; ceci explique que nous fûmes mal vus, craints et abhorrés.

Aujourd'hui, grâce à la science, nous pourrions stocker, disposer de réserves ; si papa m'avait laissé faire, j'aurais installé un congélateur dans la crypte, cela nous aurait permis de ne plus être ces éternels et nocturnes errants aux chasses incessantes...Quelle économie et quelle amélioration !...

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Un Dracula qui a changé au cours des siècles, et qui s'occupe de Giorgiu, son fils adoptif, médecin qui invente le fluospan, un sang artificiel pour qu'il puisse vivre en bonne intelligence avec les humains...

Jean-Loup Craipeau, Dracula fait son cinéma, Castor Poche, Flammarion. (lecture archi facile !)

"Il a souri. Son sourire m'étonne toujours par la blancheur des dents bien plantées. Les canines supérieures ne laissent aucun doute sur leur fonction. La perfection de cette dentition contraste avec les rides profondes de la peau parcheminée.

De ses grands doigts maigres et noueux, il a frotté (signe chez lui d'embarras) la longue arête de son nez busqué comme un cimeterre. Le nez semble plonger dans la broussaille épaisse de la moustache grise qui barre son visage anguleux. "

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  • Alexandre DUMAS père, La Dame pâle

La Dame pâle est un conte romantique et pittoresque illustrant une légende très répandue dans la littérature du XIXème siècle : le vampire. Le désir obsessionnel de la jeune femme pour son persécuteur est une victoire de la passion sur le temps. Au terme de cet affrontement infernal entre le faux-frère, créature nocturne, farouche et cruelle, et le ténébreux Grégoriska, Hedwige fuira pour la France, ne conservant des visites du vampire d'autres signes que sa pâleur mortelle...

Résumé :

Noble polonaise au teint d'albâtre, Hedwige raconte le drame advenu tandis qu'elle tentait de fuir sa demeure natale, assaillie par l'armée russe, pour les monts Carpathes. Sur le chemin du monastère de Sahastru, en pleine forêt moldave, son équipage est pris dans un guet-apens. Enlevée par Kostaki et son demi-frère aîné, Grégoriska, y vivent avec leur mère, la princesse Smérande, dernière descendante d'une illustre lignée. La jeune femme attise le désir des deux hommes, et une lutte fratricide s'engage jusqu'à la mort de Kostaki. Pour Hedwige, éprise de Grégoriska, ce décès inaugure un terrible supplice : chaque nuit, le frère maudit reviendra boire son sang, et l'emporter un peu plus dans les ténèbres.

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Filmographie

1922 : Nosferatu de Friedrich MURNAU

1945 : La Maison de Dracula, d'Erle C. KENTON

1958 : Le Cauchemar de Dracula, avec C. Lee. de Terence FISHER.

1961 : Les Maîtresses de Dracula, T. FISHER.

1965 : Dracula, Prince des ténèbres, de T. FISHER.

1968 : Le Bal des vampires, de et avec Roman Polanski.

1972 : Captain Kronos contre les vampires, de Brian CLEMENS

1979 : Nosferatu, fantôme de la nuit de Werner Herzog avec Klaus Kinski, Isabelle Adjani et Bruno Ganz. (Remake du film de Murnau)

Entretien avec un vampire avec Tom CRUISE

Blade (gore) avec Wesley SNIPES et Stephen DORFF

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7 janvier 2009 : Twilight, film américain, genre fantastique. extrait de Fascination, de Stéphenie MEYER.

réalisateur : Catherine HARDWICK

avec : Robert Pattinson et Kristen Stewart.

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La nuit et le sang sont leur royaume. Ils apportent la maladie, la malédiction, le tourment éternel de l'âme. Le Diable les inspire, les sorcières les convoquent et leur toute-puissance ne laisse aux vivants que peu de ressources. Allez, cessez de trembler, les vampires sont un mythe, bien sûr. Une histoire fabriquée par les hommes pour dire leurs peurs, leurs angoisses les plus profondes. Mais depuis quand ? Et n'y a-t-il pas un peu de "vrai" sous la légende ? Remontons le temps, effeuillons le mythe, couche après couche...

An 2000. Le mythe n'est pas mort, il bouge encore. Les vampires continuent de hanter certains villages des Carpates, cette chaîne de montagnes isolées au coeur de la Roumanie. Ne riez pas, c'est là que les buveurs de sang sont nés ; c'est là qu'ils survivent. Une ethnologue roumaine, Andréa Andreesco, a retrouvé, dans les années 80, des témoins de "rencontres"... avec un villageois défunt devenu vampire du fait de sa méchanceté ! L'ethnologue Jean Cuisenier est encore allé enquêter dans cette région en 1991. Il confirme très sérieusement : "Demandez à un Roumain s'il croit aux vampires : il vous répondra non. Mais il ne sera pas très rassuré d'avoir à parcourir à pied une longue distance alors que le soir tombe. Et s'il rencontre un inconnu, il se posera nerveusement LA question..."

Dans ces villages reculés, le vampire s'appelle "moroï" ou "stigoï". Il s'installe, dit-on, dans le coeur de ceux à qui l'on jette le mauvais sort. Si l'on n'y prend garde, si l'on ne pratique pas à temps le désenvoûtement -cérémonie religieuse, agrémentée d'incantations magiques- le "malade" faiblit puis meurt car, dit-on, le vampire suce ses forces goûlument. Ceux qui ont attiré le mauvais oeil sont souvent des gens sur qui est retombée la colère des autres. Ceux qui ont une "mauvaise vie", qui se sont enrichis trop vite, qui sont envieux, etc... Peuvent aussi devenir vampire ceux qui meurent sans confession ou sur qui pèse une malédiction.

Lorsqu'ils soupçonnent que l'un des leurs risque de devenir vampire après sa mort, les villageois des Carpates lui enfoncent des clous dans la poitrine ou, au moins, en placent dans son cercueil afin de conjurer le destin. Il est également recommandé de découper un peu de chair du bras ou de la jambe du mort et de la lui mettre dans la bouche : ainsi, il se mangera lui-même et laissera les vivants  en paix. S'il est trop tard, s'il semble que le défunt soit déjà vampire, la seule solution est de faire passer un étalon sur sa tombe. Le cheval refuse de marcher et se cabre ? Alors il faut ouvrir la fosse...où l'on risque fort de trouver un cadavre non décomposé, barbouillé de sang et couché sur le côté. Vite, on lui enfonce un pieu dans le coeur, puis on arrache ce coeur pour le donner à manger à ses proches en guise de talisman. Enfin, on brûle le cadavre : le non-mort est désormais bien mort. Voilà ce qui se pense encore dans les Carpates.

Le vampire ne serait donc qu'une superstition de montagnards isolés ? Pas seulement. Il est aussi le "dernier-né des monstres de légende, devenu un véritable mythe des temps modernes", comme le constate un grand connaisseur, l'universitaire Jean Marigny. Vérifions.

An 2000, chez nous. Le vampire se porte bien, merci...comme personnage de cinéma. Ou, rangez l'ail et les pieux, c'est seulement sur l'écran ! Mais quel déluge ! Un site internet de l'université de Paris-VIII recense 400 films traitant du sujet, depuis 1896 ! Dans tous les genres : horreur pure, humour, dérision, érotisme..., une veine inépuisable où l'on met les canines saignantes à toutes les sauces. Mais si le cinéma l'a exploité jusqu'à la corde, il n'a pas inventé le mythe du vampire. Pour retrouver sa source, il faut encore remonter le temps. Jusqu'en 1897.

Cette année-là, un directeur de théâtre britannique, Bram Stoker, écrivain amateur, imagine un personnage extraordinaire qui donne son titre au roman : "Dracula". Le succès est énorme. "Bram Stoker s'était extrêmement bien documenté sur les croyances dans les Carpates roumaines, explique Jean Marigny. Il réussit à en réaliser en quelque sorte la synthèse." Ainsi, Dracula, contrairement aux vampires littéraires qui l'ont précédé, observe toutes sortes de règles très précises. Il ne boit que du sang, peut se transformer en brouillard, en chauve-souris, en loup... Il est repoussé par des colliers de fleurs d'ail ou par la vue d'un crucifix. "Du coup, ce personnage cent pour cent littéraire devient l'archétype, le modèle précis du vampire", ajoute Jean Marigny.

En même temps, la créature de Bram Stoker est terriblement ambiguë : "Sous des dehors très moralisateurs de lutte contre le mal, c'est l'un des romans les plus érotiques du XIXème siècle, avec des relents sadomasochistes", sourit le spécialiste. En effet, Dracula, élégant aristocrate, ne manque pas de charme. Pour assouvir ses désirs, il préfère les vierges et leur suce le sang en une sorte de baiser fatal dans le cou. Celles-ci, totalement soumises dans leur sommeil, finissent par l'appeler et vouloir le rejoindre...Torride !

Frissons d'horreur et de plaisir mêlés...Pas étonnant que la littérature et le cinéma se soient approprié ce personnage fascinant. Mais le roman de Bram Stoker n'est pas encore la source première du mythe. Il faut continuer notre quête.

C'est en 1819 que paraît le premier roman à l'hémoglobine : "The vampyre" écrit par John Polidori, le secrétaire du célèbre écrivain britannique Lord Byron. Il campe déjà un vampire aristocrate, débauché et cynique : probablement un des "ancêtres" de Dracula.

Car, du côté littéraire, le comte sanguinaire est issu d'une famille nombreuse. Pour Jean Goens, spécialiste des monstres, "Dracula a hérité de Dom Juan sa séduction néfaste et, de Faust, son éternelle jeunesse et son lien avec le diable. Par ailleurs, on retrouve en lui certains traits physiques du loup-garou, comme les canines pointues, les poils abondants -dans la paume des mains et aux sourcils- et sa spécialité : les crimes nocturnes". "Le vampire est une forme de revenant, précise Jean-Claude Aguerre, auteur d'une thèse de philosophie sur le sujet. Mais ce n'est pas un fantôme immatériel qui déteste son état. Le vampire, lui, est un "non-mort" qui revient avec son corps et suce le sang de ses victimes pour s'emparer de leur âme et conserver sa force. A la différence d'autres monstres comme l'ogre ou le loup-garou : il ne dévore pas ses victimes, il les tue à petit feu et les possède".

Et pourtant, même s'il traduit des angoisses peut-être aussi vieilles que l'homme, le vampire tel qu'on le connaît en Occident est bien une apparition récente. "Une pure création du XVIIIème siècle, confirme Jean-Claude Aguerre. A cette époque, dite des "Lumières", la raison triomphe et Dieu tombe de son piédestal. Or, c'est justement à ce moment-là que l'Europe connaît une vague extraordinaire de manifestations vampiriques ! Comme si, inconsciemment, les populations, désemparées par l'affaiblissement de la religion, se tournaient vers les puissances des ténèbres pour retrouver la promesse d'immortalité." Bref, si les philosophes ont escamoté Dieu, le peuple, lui, s'adressera au Diable.

A partir de 1710, en effet, une sorte de psychose collective s'empare de l'Europe centrale. Tout commence en Prusse orientale à la suite d'une épidémie de peste. De toutes parts, on signale aux autorités religieuses et civiles locales une chose étrange : des corps de défunts ne se décomposent pas - signe, croit-on, que la personne est devenue vampire. Lesquelles autorités prennent la chose très au sérieux ! Après un véritable procès du "faux-mort" et suivant un rite traditionnel de "dévampirisation", elles font enfoncer un pieu dans le coeur du cadavre qui est ensuite brûlé.

Jean Goens, qui est aussi médecin dermatologue, n'est pas étonné. Et si les gens n'avaient fait que se défendre contre l'épidémie de peste ? En effet, "comme le vampirisme, une épidémie se transmet de proche en proche, constate-t-il. Ignorant l'existence des microbes, les gens soupçonnaient tout de même les cadavres de contaminer les vivants. Ils l'interprétaient comme une malédiction mais ils trouvaient cependant le bon geste : brûler le foyer d'infection. De plus, en période d'épidémie, on enterre les gens à la hâte. Il a pu arriver assez souvent que des "défunts" soient seulement dans...le coma ! On a très bien pu retrouver des corps non putréfiés, ensanglantés : revenus à eux, les comateux auront tenté de s'arracher à leur cercueil avec l'énergie du désespoir."

Un neurologue espagnol, Juan Gomez Alfonso, a émis une autre hypothèse : il y aurait eu, à la même époque, une épidémie de rage. En effet, cette maladie est attestée en Hongrie dans les années 1721-1728 chez des chiens, des chauves-souris et des loups. Ils ont pu transmettre la rage à l'homme par morsure. Or, les symptômes de la rage humaine -comme l'errance nocturne ou les troubles nerveux qui poussent certains enragés à mordre leurs prochesds- présentent des analogies troublantes avec le vampirisme. Le rapprochement est tentant.

Vers 1725, le phénomène touche l'Autriche, la Serbie, la Pologne, la Russie. La France apprend la chose par l'intermédiaire des gazettes et des innombrables traités qui rapportent des histoires extraordinaires d'hommes devenus vampires - le mot, d'origine moldave, apparaît en 1726 à Vienne et sera transcrit en français en 1732. Le roi Louis XV est fort intéressé, les cours européennes se passionnent pour le phénomène, qui fait pourtant ricaner les philosophes. Quant à l'impératrice Marie-Thérèse d'Autriche, elle s'inquiète du désordre engendré par ces procès faits à des défunts. En 1755, elle commande au docteur Van Swieten un rapport médical.

De fait, les conclusions du médecin sont très claires : les commissions locales ont agi avec légèreté. Elles ont ouvert les cercueils au bout de quelques semaines, alors qu'il faut parfois des mois avant qu'un cadavre se décompose, surtout dans ces régions froides. "Van Swieten diagnostique par ailleurs très bien ce que l'on nomme aujourd'hui "angoisses nocturnes", ajoute Jean Goens. Certains témoins qui décrivent un sentiment d'étouffement ressenti pendant leur sommeil - qu'ils attribuent à un vampire- en souffrait certainement." Pas étonnant qu'on s'angoisse, quand l'épidémie rôde...

Marie-Thérèse d'Autriche, convaincue de l'absurdité de ces procès, retire alors tout pouvoir de justice posthume à ces commissions locales. Le pape Benoît XIV lui emboîte le pas en rappelant fermement aux archevêques de ces régions que la conservation des corps n'est pas un prodige ! l'"épidémie" de vampirisme s'éteint alors progressivement.

Cependant, la peste ou la rage n'ont pu, à elles seules, faire surgir pareille terreur. Certains tueurs en série, bien réels ceux-là, ont pu également frapper l'imagination de ces populations. Et particulièrement, au début du XVII ème siècle, Erzébet Bathory.

Cette comtesse hongroise a séquestré et torturé dans son château des dizaines, voire des centaines de jeunes filles qu'elle faisait enlever dans les villages alentour. Puis elle les saignait à mort et prenait des bains de leur sang pour conserver sa jeunesse. tous les ingrédients de l'horreur étaient déjà réunis...si ce n'est que le "vampire" était, dans ce cas, une femme bien réelle ! A noter que le château de Bathory, isolé et sinistre, était situé près des Carpates...

L'histoire n'est pas finie. La Bathory n'est pas la source la plus ancienne du mythe. Il faut encore reculer de deux siècles, vers 1450, à la fin du Moyen Âge. En ces temps reculés, la Roumanie est divisée en provinces dirigées par des "voïvodes", ou nobles gouverneurs. Ces souverains passent leur existence à batailler contre les Turcs musulmans qui cherchent à s'emparer de ce coin de chrétienté. L'un de ces voïvodes s'appelle Vlad IV. Il est prince de Valachie, la province bordée par les Carpates. Il est aussi le fils de Vlad III, fait Dracul par l'empereur germanique Sigismond, pour le remercier de son ardeur anti-turcs. Dracul signifie en roumain : chevalier de l'ordre du Dragon...

Vlad Dracul IV n'est pas un enfant de choeur. On le surnomme Tepes, "l'empaleur", du nom d'un supplice turc auquel il recourt volontiers. Vlad Dracul, aux yeux des Roumains, est un héros national : il a tout fait pour sauvegarder l'indépendance de la Valachie. Seulement voilà, il en prend trop à son aise avec les Hongrois, ses protecteurs, chrétiens comme lui, mais qui convoitent la Valachie, comme les Turcs. Aussi, ces ennemis diffusent-ils une "légende noire" de Vlad. La rumeur le dépeint comme un monstre dégoulinant de sang festoyant parmi des centaines d'empalés vivants. Les Hongrois le feront d'ailleurs arrêter et, probablement, assassiner en 1476. Le héros anti-Turcs était devenu un gêneur.

Comme cette mort en rajoutait dans l'admiration des Roumains pour leur héros, les Hongrois en rajoutèrent dans leur propagande de l'horreur. Vlad aurait conclu dans les Carpates un pacte avec le Diable... Il serait devenu un vampire.

Plus profondément encore, derrière ce personnage historique, derrière le folklore des Carpates, Jean Cuisenier voit "un apport païen qui remonte au moins à la pensée grecque !" Il avance comme indice que le mot "strigoï", employé en roumain pour désigner un vampire, rappelle la stryge grecque. Celle-ci est une sorte de vampire-oiseau, le tout premier buveur de sang parvenu à notre connaissance. La boucle est bouclée ? Non. Le même ethnologue relie encore le mythe du vampire à certains rites de la ...préhistoire ! Etonnant ? Pas tant que ça. Le sang, le sexe, la mort, l'envoûtement, les âmes errantes, le monstre : autant de thèmes vedettes depuis la nuit des temps. Le vampire sort aussi de cette nuit-là.

Marie Selu.

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"La tombe de la comtesse", extrait de L'invité de Dracula

Le narrateur s'est égaré dans une obscurité totale. Il cherche à s'abriter de la violence de l'orage dans ce qu'il croit être une maison abandonnée.

Tout d'un coup, la lune sortit des nuages et je réalisai à ce moment-là que je me trouvais dans un cimetière, et que la construction carrée qui était  en face de moi n'était autre qu'une grande tombe tout en marbre, aussi blanche en vérité que la neige qui la recouvrait et l'environnait. A l'apparition du clair de lune se produisit un terrible gémissement de l'orage, qui eut l'air  de  reprendre sous forme d'un long hurlement bas, comme s'il se fût agi d'une énorme meute de chiens ou d'une horde de loups. J'eus très peur, je frémis de la tête aux pieds et je sentis très distinctement le froid s'aggraver au-dessus de moi jusqu'à sembler me pénétrer au plus profond de mon être. Puis, tandis que la lumière de la lune éclairait encore la tombe de marbre, l'orage donna de nouveaux signes de recrudescence, comme s'il revenait sur ses pas. Poussé par une espèce de fascination, je m'approchai de la tombe pour mieux la voir, et essayai de comprendre pourquoi un tel monument se dressait là tout seul dans un pareil endroit. J'en fis le tour, et je lus l'inscription en allemand, gravée sur la porte dorique :

Comtesse Dolingen de Gratz

En Styrie

recherchée et retrouvée morte

1801

Bram Stoker, L'Invité de Dracula, (posthume, 1914), Pocket, trad. J. Finné, 1992.

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Les romans

John William
Polidori, Le Vampire
G.T.A.
Hoffmann, La Vampire
Sheridan
Le Fanu, Carmilla
Bram
Stoker, Dracula, L'Invité de Dracula
Alexis
Tolstoï, Oupires
Claude
Seignolle, Pauvre Sonia, Le Chupador
Norman
Spinrad, Le Mal des vampires
S.P.
Somtow, Vampire Junction
Anne
Rice, Le Maître de Rampling Gate
Catherine L.
Moore, Shambleau.

ainsi que des nouvelles de :


David
Scoll-Moncrieff, Schloss Wappenburg
Peter Schuyler
Miller, Au-dessus de la rivière
Jean
Ray, Le Gardien du cimetière
Mary E.
Wilkins-Freeman, Luella Miller
Gustav
Meyrink, La visite de J.H. Obereir chez les sangsues du temps
F.
Benson, Mrs. Amworth, Et nul oiseau ne chante
Edith
Wharton, L'Ensorcelé
D.A.
Johnstone, Monsieur Alucard
Richard
Matheson, Derrière l'écran.


Date de création : 21/11/2006 @ 21:37
Dernière modification : 29/09/2009 @ 18:08
Catégorie : fantastique
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+ Le roman policier
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