Texte à méditer :  Je ne parlerai pas, je ne penserai rien
Mais l'amour infini me montera dans l'âme.
   Arthur Rimbaud
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1 mars 2011

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Poésies

Et encore la même chose

Je dis simplement la merveille

la modestie du ciel vivant

le petit pesant d'or d'une abeille

l'éclat du sel qui est tout blanc

toi différente mais pareille

Je dis simplement la merveille

de tous les jours te retrouver.

Claude Roy, "Et encore la même chose", Clair comme le jour, Poésies Gallimard.

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Chant du chevalier

Il était noble, il était fort.

Il se battait pour une reine.

Il était noble, il était fort

Et fidèle jusqu'à la mort.

Il la prit par la main un soir.

- C'était la plus pauvre des reines -

Il la prit par la main un soir

Et la fit sur le trône s'asseoir.

Il posa la couronne d'or

-C'était la plus humble des reines -

Il posa la couronne d'or

Sur sa tête comme un trésor.

Haut l'épée, il se tenait droit

- C'était la plus faible des reines -

Haut l'épée, il se tenait droit

Pour la défendre, elle et son droit.

A ses pieds tristes, en vainqueur,

- C'était la plus triste des reines -

A ses pieds tristes, en vainqueur,

Il mit le monde...hors son coeur.

Il mourut pour sa reine un jour.

- C'était la plus pauvre des reines -

Il mourut pour sa reine un jour...

Il aimait une autre d'amour.

Marie Noël, "Chant du chevalier", L'Oeuvre poétique", Stock, 1969.

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Les feuilles volantes

Adieu mon livre, adieu ma page écrite,

Se détachant de moi comme une feuille,

Me laissant nu comme un cliché d'automne.

Je vous dédie une arche de parole

Pour naviguer, mes amis, naviguer

Dans ma mémoire où se taisent les loups.

Vole ma feuille au-dessus de la ville,

Franchis le fleuve et détruis la frontière.

Amour, amour, ô ma géographie !

Et si tu cours au fil de l'onde, un songe

Recueillera mes images mouillées

Que dans un pré le soleil sèchera.

Poète ici, Poète comme un arbre

Offrant sa feuille à la terre gourmande

Et dans l'humus herbe ressuscitant.

Un autre livre, une parole neuve,

Les mêmes mots dans d'autres mariages

Et toujours l'homme et son tapis volant.

Robert Sabatier, "Les feuilles volantes", in Icare et autres poèmes, Editions Albin Michel.

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Réveil

Le monde me quitte, ce tapis, ce livre

Vous vous en allez ;

Le balcon devient un nuage libre

Entre les volets.

Ah ! Chacun pour soi les quatre murs partent

Me tournant le dos

Et comme une barque au loin les commandent

D'invisibles flots.

Le plafond se plaint de son coeur de mouette

Qui se serre en lui,

Le parquet mirant une horreur secrète

A poussé un cri

Comme si tombait un homme à la mer

D'un mât invisible

Et couronné d'air.

Jules Supervielle, "Réveil", in Gravitations, Editions Gallimard, 1925.

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Chanson de la Seine

La Seine a de la chance

Elle n'a pas de soucis

Elle se la coule douce

Le jour comme la nuit

Et elle sort de sa source

tout doucement sans bruit

et sans se faire de mousse

sans sortir de son lit

Elle s'en va vers la mer

En passant par Paris

La Seine a de la chance

Elle n'a pas de soucis

Et quand elle se promène

Tout le long de ses quais

Avec sa belle robe verte

Et ses lumières dorées

Notre-Dame jalouse

Immobile et sévère

Du haut de toutes ses pierres

La regarde de travers

Mais la Seine s'en balance

Elle n'a pas de soucis

Elle se la coule douce

Le jour comme la nuit

Et s'en va vers le Havre

Et s'en va  vers la mer

En passant comme un rêve

Au milieu des mystères

Des misères de Paris.

Jacques PREVERT, "Chanson de la Seine", Extrait de "Aubervilliers" in Spectacle, Ed. Gallimard,

1972.

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Lettre aux gens très sages

Non il n'est pas fou

Celui qui parle au vent

aux murs aux rues aux lampadaires

à l'ombre du chat sur la fenêtre

aux mains fragiles

qui l'aiment et le connaissent

Il n'est pas fou

celui qui voit la mer

dans son miroir

et des chiens bleus

dans les nuages

Non le poète n'est pas fou

il rêve il rêve

et nous attend

sous le manteau de son mystère

au coeur du monde imaginé.

Jean-Pierre SIMEON, La Nuit respire, Cheyne, 2003.

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LE BUFFET

C'est un large buffet sculpté ; le chêne sombre,

Très vieux, a pris cet air si bon des vieilles gens ;

Le buffet est ouvert, et verse dans son ombre

Comme un flot de vin vieux, des parfums engageants ;

Tout plein, c'est un fouillis de vieilles vieilleries,

De linges odorants et jaunes, de chiffons

De femmes ou d'enfants, de dentelles flétries,

De fichus de grand-mère où sont peints des griffons ;

- C'est là qu'on trouverait les médaillons, les mèches

De cheveux blancs ou blonds, les portraits, les fleurs sèches

Dont le parfum se mêle à des parfums de fruits.

- Ô buffet du vieux temps, tu sais bien des histoires,

Et tu voudrais conter tes contes, et tu bruis

Quand s'ouvrent lentement tes grandes portes noires.

Arthur Rimbaud, Poésies, 1870.

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La Panthère noire

Par les sentiers perdus au creux des forêts vierges

Où l'herbe épaisse fume au soleil du matin ;

Le long des cours d'eau vive encaissés dans leurs berges,

Sous de verts arceaux de rotins ;

La reine de Java, la noire chasseresse,

Avec l'aube, revient au gîte où ses petits

Parmi les os luisants miaulent de détresse,

Les uns sous les autres blottis.

Inquiète, les yeux aigus comme des flèches,

Elle ondule, épiant l'ombre des rameaux lourds.

Quelques taches de sang, éparses, toutes fraîches,

Mouillent sa robe de velours...

Sur la haute fougère elle glisse en silence,

Parmi les troncs moussus s'enfonce et disparaît.

Les bruits cessent, l'air brûle et la lumière immense

Endort le ciel et la forêt.

Leconte de Lisle, Poèmes barbares

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Les enfants

Tous les enfants, vous le savez, sont des navires

Qu'un proverbe pareil aux brises les plus douces

Conduit, syllabe après syllabe, au continent

Où les pingouins dorés murmurent des poèmes.


Tous les enfants, vous le savez, sont des bouleaux

Qui dans la nuit, en demandant pardon, écartent

Leurs branches, leur écorce, et vont, jusqu'au vertige,

Danser sur la grand-place, au milieu des poulains.

Tous les enfants, vous le savez, sont des comètes

Venues pour rendre hommage au nom d'un autre azur,

D'une autre vérité, d'une autre fable ; et nous,

Adultes par défaut, saurons-nous les convaincre

De s'attarder ici le temps d'un bref bonheur,

Avant de repartir chez les étoiles folles ?

ALain BOSQUET, "Les Efants", In Sonnets pour une fin de siècle, Editions Gallimard, 1980.

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La nuit

Elle est venue la nuit de plus loin que la nuit

à pas de vent de loup de fougère et de menthe

voleuse de parfum impure fausse nuit

fille aux cheveux d'écume issue de l'eau dormante


Après l'aube la nuit tisseuse de chansons

s'endort d'un songe lourd d'astres et de méduses

et les jambes mêlées aux fuseaux des saisons

veille sur le repos des étoiles confuses


Sa main laisse glisser les constellations

le sable fabuleux des mondes solitaires

la poussière de Dieu et de sa création

la semence de feu qui féconde les terres


Mais elle vient la nuit de plus loin que la nuit

à pas de vent de mer de feu de loup de piège

bergère sans troupeaux glaneuse sans épis

aveugle aux lèvres d'or qui marche sur la neige.


Claude ROY, "La nuit", extrait de "Jamais je ne pourrai", in Poésies, Editions Gallimard, 1970.


Date de création : 17/03/2008 @ 16:36
Dernière modification : 26/01/2010 @ 14:33
Catégorie : Lecture
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